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Évaluation in itinere de l’Initiative Solidarité, Santé, Sahel (I3S)
Cette évaluation fait le bilan à mi-parcours d’une initiative thématique (la santé de la mère et de l’enfant) et ciblée géographiquement (Sahel), conçue comme étant un catalyseur d’interventions régionales.
Contexte

Le 13 mai 2013, M. Pascal Canfin, ministre délégué chargé du développement, annonçait le lancement « d’une initiative française pour l’accès aux soins des enfants du Mali et des autres pays du Sahel » (I3S). Cette facilité devait faciliter l’accès aux soins des enfants en appuyant la mise en place de systèmes financiers solidaires d’accès aux soins au Sénégal, Mali, Niger, Tchad, Mauritanie et Burkina Faso. 

Financée par le Fonds de Solidarité pour le Développement (FSD) pour un montant de 30 millions d’euros et gérée par l’AFD, l’I3S est pilotée par un Comité d’orientation stratégique (COS) présidé par le ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE) et composé d’une dizaine de membres dont l’AFD, des représentants de la société civile et des personnalités qualifiées. 

Objectifs

Le MEAE et l’AFD ont décidé de réaliser une évaluation in itinere de l’I3S qui s’inscrit dans une double finalité :

  • de redevabilité tout d’abord compte tenu de son financement par le FSD et de sa mise en œuvre par l’AFD pour le compte de l’État, 
  • d’apprentissage, ensuite, afin de de tirer les premiers enseignements issus de la mise en œuvre d’un Initiative financée par une taxe et ciblée thématiquement et géographiquement, et ce, afin d’éclairer la décision publique.

Cette évaluation est complétée par un volet consacré à l’appréciation de mécanismes de suivi des projets (Dispositifs de Suivi-Evaluation-DSE) (systèmes d’information, enquêtes), au Sénégal et au Mali, afin de s’assurer que ces derniers sont bien en mesure de renseigner l’efficacité du programme. 

Méthode

L’évaluation porte à la fois sur l’initiative telle qu’elle a été pensée puis formalisée et sur le contenu des projets I3S qui traduisent sa mise en œuvre. En revanche, elle ne vise pas à évaluer la mise en œuvre des projets financés par l’initiative. Pour les projets combinant des financements I3S et des financements Muskoka (Mali, Tchad) l’analyse évaluative, notamment pour ce qui concerne le critère d’efficacité, est focalisée sur les composantes relatives aux financements I3S.

L’évaluation a suivi une démarche en trois phases :

  • une phase de cadrage (juillet-août 2017) afin de préciser la méthodologie de l’évaluation, (les questions évaluatives en lien avec les critères du CAD, la reconstitution de la logique d’intervention, les outils de collecte et d’analyse)
  • une phase de collecte (septembre-novembre 2017) articulée autour d’une recherche documentaire approfondie à Paris et des missions de terrain dans les pays concernés (Sénégal, Mali, Tchad et Niger)
  • une phase d’analyse et de jugement (décembre-février 2018) qui a permis d’analyser les données et d’en extraire, sous forme synthétique, les principaux enseignements et recommandations.

La réalisation de cette évaluation a été confrontée à plusieurs difficultés dont celle liée à l’évaluation d’une initiative sans pour autant évaluer les projets qu’elle finance. Ces difficultés sont exposées plus en détail dans le rapport final, consultable sur le site internet de l’AFD. L’évaluation a été confiée au cabinet HERA par le département Évaluation et apprentissage (EVA) de l’AFD.
 

Résultats

Les objectifs de l’initiative et des projets financés en son sein, par l’AFD, sont globalement pertinents. L’I3S est parfaitement cohérente avec les principaux documents de stratégie relatifs à l’aide publique au développement (APD) française, notamment dans le domaine de la santé. 

En revanche, la santé ne se retrouve que partiellement dans les priorités opérationnelles du Plan d’action pour un engagement renouvelé au Sahel 2015-2020 de l’AFD. Il y a également cohérence entre l’I3S et les autres initiatives telles que le Fonds Français Muskoka (santé maternelle et infantile-SMI), l’appui au réseau P4H, protection sociale santé de l’OMS(protection sociale santé) et l’initiative 5 % (impact du Fonds mondial sur la santé maternelle et infantile à travers la lutte contre le sida, la tuberculose et le paludisme). Les évaluateurs ont pu vérifier que les projets financés par l’I3S étaient bien alignés sur les politiques et stratégies sectorielles santé et protection sociale des pays bénéficiaires.

Les résultats sont partiellement atteints. Le calendrier dicté par les engagements politiques était contraint. Si la rapidité des études et des décaissements, tel que voulu par les initiateurs de l’I3S, a été relativement atteint, l’atteinte de ces résultats en terme de rapidité, l’aura été au détriment de la conception, maturité des projets : ce calendrier contraint aura été contre-productif car des études de faisabilité plus poussées (financement de la demande et CSU) auraient peut-être permis d’éviter certains blocages des projets I3S ; et des périodes d’étude plus longues auraient sans doute permis de ne pas éliminer trop rapidement les pays éligibles tels que le Burkina Faso et la Mauritanie. 

Finalement, les délais d’étude ont été plus longs que prévu, sauf au Niger, et les mises en œuvre ont accusé beaucoup de retard en raison de la lenteur du recrutement des assistances à maîtrise d’ouvrage. À la période très dynamique d’étude des projets, de la seconde moitié de 2013 et 2014, et de signature des conventions de financement, a succédé une période de plus grande inertie en 2015 et 2016.

Enseignements

La valeur ajoutée essentielle de l’I3S réside principalement dans les opportunités d’apprentissage offerts dans le domaine de la protection sociale sante/CSU par des canaux habituellement peu empruntés par les partenaires techniques et financiers (PTF), en ciblant concomitamment quatre pays tous engagés dans la CSU, à des stades très différents de maturité et donc de mise en œuvre. 

Les entretiens et données recueillies n’ont donné aucun élément qui permettrait d’affirmer que les financements plus classiques, les crédits budgétaires issus du programme 209, offriraient plus de visibilité ou de prédictibilité à moyen terme que des financements sur fonds spéciaux alimentés par des taxes spécifiques affectées et rassemblés dans une Initiative. Quant à la question de la durabilité des interventions financées, elle est davantage liée à la capacité des pays bénéficiaires à prendre le relais. Il n’y a pas non plus de visibilité, à moyen terme, des dépenses publiques de santé/protection sociale dans les pays bénéficiaires de l’I3S.

Une certaine candeur a prévalu de la part des promoteurs de cette initiative, candeur qui consistait à associer à l’avance « appui à la gratuité des soins pour les enfants » et « diminution de la mortalité infanto-juvénile » et tout cela avec de l’argent prélevé sur les transactions boursières.

Depuis 2006-2007 pour le Niger, des études montraient que les systèmes de gratuité des soins, avec compensation par l’État du manque à gagner des prestataires de services, se heurtaient à des problèmes d’administration, de gestion, et de disponibilité des fonds publics. Les concepteurs de l’I3S ont sans doute sous-estimé ces problèmes ou surestimé l’efficacité potentielle d’un appui institutionnel classique pour en venir à bout. Si la CSU est un projet de société, alors les problèmes et les solutions ne peuvent pas simplement être d’ordre technique ou gestionnaire : c’est tout le contexte qu’il aurait fallu questionner au sein des différentes plateformes de dialogue sectoriel.
 

29/06/2016
Date de début du projet
06/07/2018
Date de fin du projet
Burkina Faso, Mali, Mauritanie, Niger, Tchad et Sénégal
Localisation
Achevé et évalué
État

Contact :

Sabrina Guérard