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Côte d'Ivoire, formation
Mars 2018 : 250 jeunes sans emploi et sans expérience, issus de familles très pauvres et parfois livrés à eux-mêmes, entrent au Centre civique d’action pour le développement (CCAD), près d’Abidjan. Neuf mois plus tard, c'est 218 mécaniciens, constructeurs métalliques, électriciens, techniciens en froid et climatisation qui en sortent… Tous prêts pour leur stage professionnel, dernière étape de ce programme qui vise à transformer la jeunesse de Côte d’Ivoire et à réduire les inégalités.

« Fier citoyen, j’aime mon pays et je respecte ses lois. Je suis un exemple pour les générations. Courageux, je travaille à me former pour mieux servir la nation. À mon travail répond la réussite », scandent en chœur les premiers stagiaires sortants du CCAD de Bimbresso, à 20 km à l’ouest d’Abidjan. L’hymne d’une nouvelle vie.

Jean Donald Diarra, ancien accro à la drogue, aux larcins et aux bagarres, au départ réticent, a tout de même tenu jusqu’au bout. Il est aujourd’hui totalement transformé : « Depuis qu’il est entré au centre, il y a eu un énorme changement. Dans son comportement, sa manière de parler, même son aspect physique a changé. Avant, on ne pouvait pas le regarder en face », témoigne Fatou, sa sœur. 

Un exploit dont ne doutait pas le lieutenant Paratian Yeo, chef adjoint du centre civique financé avec l’AFD via un contrat de désendettement et de développement (C2D) : « L’objectif était d’encadrer ces enfants pour qu’ils soient respectés et respectueux. Objectif atteint ! »

De mars à décembre 2018, ces 250 jeunes hommes (uniquement), âgés de 15 à 26 ans, ont été formés à la citoyenneté, au civisme mais également à la pratique d’un métier. Les premiers stagiaires volontaires du CCAD ont également obtenu le permis de conduire et le brevet national de secourisme. Neuf mois passés en internat avec pour seul contact vers l’extérieur le superviseur général, qui parfois leur autorisait un appel de son bureau. 

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Ici, on parle, on vit, on respire discipline. Ce sont des gendarmes volontaires formés à l’approche sociale par des ONG qui assurent l’encadrement. Malgré ce cadre strict que certains préféreront quitter, un sentiment d’appartenance se crée, une complicité entre jeunes et encadrants (femmes et hommes) se développe. Peu à peu, la vie en communauté dans le centre devient un tremplin pour ces jeunes.
 

Ce centre nous a permis de marcher droit, de nous fixer des objectifs, de transformer nos lacunes en opportunités, d’avoir des rêves et surtout d’aimer le travail et ses nombreuses vertus, en faisant quelque chose de nos dix doigts. C’est un héritage qui doit nous accompagner, avec l’exercice d’un emploi honnête, vers notre autonomie sociale et professionnelle.

Seri Aristide, stagiaire du CCAD et porte-parole de promotion

Pour Jean Donald, l’ancien délinquant, l’avenir s’annonce prometteur : « Avant je faisais trop de bêtises, de choses bizarres, mais aujourd’hui c’est derrière moi. On est venu ici pour changer, pour avoir une vie meilleure. J’ai hâte de commencer un stage en électricité bâtiment et montrer la personne que je suis devenue à mes proches que j’ai souvent déçus », admet le jeune homme.
 

Un métier, une nouvelle vie
 

Côte d'Ivoire, formationKévin Gnahoulé (photo ci-contre), 25 ans, est stagiaire en construction métallique. Avant, il était agent de sécurité à Marcory, une commune d’Abidjan. Recruté sur le tas donc sans réelle qualification, il entend parler du centre civique grâce à un voisin de quartier. Marié et père de famille, Kévin n’y prête aucun intérêt. Renoncer à un salaire, certes en dessous du Smic mais qui lui permet de subvenir aux besoins des siens, pour une simple formation ? Jamais ! Il finit pourtant par s’inscrire sur le conseil de son voisin et l’insistance de son épouse. Il est retenu. 

Kévin abandonne donc son emploi et « se lance dans l’inconnu ». Pour ne pas laisser sa femme et sa fille dans le besoin, il leur envoie la quasi-totalité de sa bourse trimestrielle. « C’est pour elles que je suis là, lâche-t-il la larme à l’œil. Avant le stage au CCAD, on était turbulents, agressifs, inconscients et indisciplinés. Le centre nous aura remis sur les bons rails. Ce projet-là a changé notre vie. Et je souhaite continuer dans ce que nous avons pu accomplir ici », dit-il en montrant fièrement des grilles, portails, fourneaux et autres réalisations fabriquées de ses mains. 

Les 218 ex-pensionnaires du CCAD débuteront leur stage professionnel début 2019, grâce notamment à des partenariats avec la Chambre nationale des métiers. Comme eux, des centaines d’autres jeunes Ivoiriens bénéficieront du même dispositif. Des CCAD ont été construits ou sont en construction à Sassandra, M’bahiakro et Bouaké. Dans ce dernier, les filles aussi auront l’opportunité de donner un sens nouveau à leur vie. 

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