Si l’Afrique du Sud célèbre cette année l’anniversaire des 25 ans de la fin de l’apartheid, la nation arc-en-ciel rêvée par l’icône Nelson Mandela peine encore à accepter ses différences. Les Sud-Africains noirs ou métis restent particulièrement discriminés. La ville de Bredasdorp, au sud-ouest de la province du Cap-Occidental, concentre tous les maux d’une Afrique du Sud post-apartheid toujours ghettoïsée. Symbole de cette fracture, il y a six ans seulement, un immense mur séparait encore les habitants des quartiers déshérités, qui rassemblent 85 % des habitants de la ville, des quartiers blancs plus aisés.
À Bredasdorp, la jeunesse peine à trouver du travail. Le taux de chômage des 15-35 ans atteint 20 % et près de 22 % des 15-17 ans sont victimes de travail forcé. Ajoutez à cela une vie associative quasi inexistante, une consommation de drogues et d’alcool dévastatrice, de multiples grossesses en bas âge et un absentéisme scolaire record qui atteint les 30 %… Difficile, dans ces conditions, de rester motivé et de se dessiner un avenir.
C’est pour se confronter à cette réalité sociale et démographique et avec la volonté de changer la donne que Waves for Change et l’AFD ont décidé de mener le projet pilote de l’application mobile W4C à Bredasdorp.
À Bredasdorp, le projet pilote de l’application Waves for Change est évalué par Lauren October. À 27 ans, cette chercheuse de l’Université du Cap est spécialisée dans les initiatives de sécurité et de réduction des violences. Elle est née et a grandi ici. D’entrée, elle pose le décor : « Je suis aujourd’hui chercheuse dans une grande université du pays mais je peux vous dire que quand on passe son enfance à Bredasdorp, ce n’est pas facile d’arriver à faire des études supérieures. »
Lauren est en charge de l’évaluation d’impact de l’application Waves for Change dans la ville. « J’ai fait passer une annonce dans le journal local pour recruter 30 coachs et leur expliquer le projet. J’ai reçu 70 appels dès le premier jour », explique-t-elle. Un engouement facile à comprendre tant Bredasdorp est une ville socialement et économiquement sinistrée.
« Devant une telle situation, nous avons tout de suite compris combien les effets de l’application Waves for Change pourraient être positifs tant sur les coachs que sur les participants aux activités. Cela leur donne tout simplement une raison de faire quelque chose de leur vie. »
Pour déterminer l’impact de l’application Waves for Change, deux critères sont évalués en priorité : la confiance en soi des coachs et leur indépendance financière. « Si une personne au chômage parvient à gagner une somme régulière pendant quelques mois en donnant des cours de sport grâce à l’application, cela va avoir un impact immédiat sur son humeur et son pouvoir d’achat. Toute la question est de voir si cette application va aussi permettre à ses utilisateurs d’avoir plus confiance en eux pour s’engager encore davantage pour leur communauté. »
Un mois seulement après son lancement, près de 1 000 personnes ont déjà participé à une activité sportive dispensée par des éducateurs Waves for Change ! Soit 5 % de la population de Bredasdorp.
L’application Waves for Change veut bousculer les codes établis par la plupart des ONG et agences de développement. Comment ? En éliminant tous les intermédiaires entre le bailleur de fonds et le travailleur social sur le terrain.
« Ceux qui donnent leur argent veulent s’assurer que chaque centime profitera directement à la cause pour laquelle ils s’engagent. Avec cette application, il n’y a pas d’argent qui se perd en chemin, comme c’est trop souvent le cas », explique Tim Conibear.
En soutenant financièrement le projet pilote de l’application Waves for Change, l’AFD s’aventure sur un nouveau terrain. Elle donne son appui à une belle idée pendant une période probatoire. Une nouvelle manière de soutenir des projets représentant les valeurs défendues par l’Agence française de développement.
Si les résultats de cette période d’essai sont concluants, l’AFD et Waves for Change pourraient étendre le projet à plusieurs autres villes sud-africaines et multiplier de façon exponentielle le nombre de coachs… et de sourires d’enfants.