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Comment agir pour la santé et la sécurité des populations au Sahel dans un contexte de crise ? Christophe Paquet, responsable de la division Santé et Protection sociale de l’AFD, revient sur les grands enjeux de la région.

Christophe Paquet, AFD

Quelle est la situation sanitaire au Sahel ?

C’est la région du monde où les indicateurs de santé sont les plus dégradés. Le taux de malnutrition chronique frise les 40 % et la mortalité maternelle et infantile y reste très élevée. La production alimentaire des pays de la région risque par ailleurs de se réduire en raison, entre autres, du réchauffement climatique.

Les services de santé sont quant à eux en très mauvais état, en particulier dans les zones reculées : on y manque de personnel soignant, l’approvisionnement en médicaments est insuffisant et les bâtiments se dégradent.

L’insécurité qui y règne aggrave-t-elle la situation ?

Quand un groupe terroriste arrive dans un endroit, les représentants de l’État en charge des services de base aux populations deviennent des cibles. Il faudrait donc arriver à maintenir une présence sur ces territoires où la santé et l’éducation sont des enjeux forts... Plus modestement, si on parvient à le faire dans des régions où ces groupes ne sont pas encore influents, c'est déjà une réussite.

Il faut aussi avoir une approche territoriale plutôt que sectorielle : si un hôpital fonctionne mais qu’il n’y a aucune école à proximité, des médecins ne voudront pas s’y installer. Une chose est sûre : accompagner les projets de nos partenaires dans le Sahel est plus complexe qu’auparavant.

Quels genres de projets l’AFD soutient-elle sur le terrain ?

Des projets assez classiques, comme Initiative solidarité santé Sahel (I3S) qui, depuis 2013, encourage des politiques de gratuité d’accès aux soins pour les enfants de moins de cinq ans et les femmes enceintes au Mali, au Niger, au Sénégal et au Tchad.

Mais aussi des projets innovants : au Niger, en complément d’un soutien à la politique nationale de planification familiale, l’AFD finance le versement d’une allocation aux familles qui maintiennent leurs filles au collège. L’idée est de diminuer le nombre de mariages précoces, et d’infléchir à plus long terme la mortalité maternelle et la courbe démographique.

On travaille également à améliorer la qualité des aliments destinés aux nourrissons et aux femmes enceintes, en aidant les petites et moyennes entreprises du secteur au Burkina Faso, au Mali et au Niger. C'est le projet Nutrition Sahel.

Comment progresse la protection sociale dans les pays du Sahel ?

Il y a une forte attente des populations et une prise de conscience des politiques sur l’importance du sujet. Des dispositifs différents sont testés d’un pays à l’autre... Les deux portes d’entrée que nous soutenons concernent le transfert monétaire et l’accessibilité financière aux soins.

En Mauritanie, des femmes enceintes payent par exemple un forfait qui leur garantit une prise en charge, y compris en cas de complication de la grossesse nécessitant une césarienne. Le système, subventionné par l’État, fonctionne à la manière d’une mutuelle. L’enjeu est que les gens accèdent davantage aux soins, mais aussi que le système soit financé. Il ne suffit pas de décréter que la santé est gratuite... Lorsque l’argent de l’État ou de la communauté internationale est là, il faut encore des circuits de distribution facilitant, par exemple, le versement des allocations à des millions de personnes.