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Très efficaces dans la lutte contre le changement climatique, les Solutions fondées sur la nature (SfN) sont encore peu ou mal exploitées. Pour y remédier, l'UICN a travaillé, avec le soutien financier de l'AFD, à la définition d'un standard mondial, un cadre susceptible d'harmoniser les pratiques et rendre les SfN plus opérationnelles et faciles à mettre en oeuvre.

Innover avec le potentiel que nous offre notre environnement : c’est précisément la philosophie d’un concept déjà expérimenté par de nombreux gouvernements, communautés locales, entreprises ou ONG, celui des Solutions fondées sur la nature (SfN). Ce concept part d’une réalité longtemps occultée : face aux défis majeurs comme le changement climatique, la raréfaction ou la pollution de l’eau, les risques sanitaires, la sécurité alimentaire ou encore l’érosion de la diversité biologique du fait de l’urbanisation non maîtrisée, la nature est… notre meilleure alliée. 

Ce constat s’appuie sur les résultats très positifs issus de l’évaluation, depuis plus de vingt ans, de services dits « écosystémiques ». Un terme un peu technique qui recoupe une idée simple : notre planète ne cesse de nous rendre service. De nombreuses expérimentations développées dans le champ de la reforestation, du développement urbain durable ou de la restauration des écosystèmes littoraux (dunes, lagunes, récifs coralliens, mangroves) ou marins le prouvent désormais.

L’UICN estime ainsi que les SfN ont le potentiel de fournir jusqu’à 37 % de nos besoins en matière d’atténuation du changement climatique. Elles peuvent également réduire l'impact de la crise climatique sur les personnes et la nature en diminuant le risque de catastrophes et en offrant une meilleure résilience aux communautés locales, notamment par une gestion durable de l’eau.

Les bénéfices attendus de la restauration des aires marines, par exemple, sont considérables. Si son coût immédiat nécessiterait de mobiliser entre 45 et 228 milliards de dollars à l’échelle de la planète, le bénéfice attendu à long terme, notamment pour la pêche et le tourisme, serait quant à lui de 622 à 1 145 milliards de dollars, selon le programme d’Évaluation française des écosystèmes et services écosystémiques (EFESE).
 
Malgré ce potentiel gigantesque démontré par l’expérimentation, les SfN sont encore sous-utilisées. En cause, principalement, l’absence de cadre commun susceptible d'harmoniser les pratiques. Or, un tel cadre est essentiel pour accroître l'échelle et l'impact de cette approche, prévenir les résultats négatifs imprévus ou les utilisations abusives et, surtout, aider les organismes de financement, les décideurs publics et les autres intervenants à évaluer l'efficacité des projets et leur intérêt économique.

Une norme apprenante

Lancé en juillet 2020, le standard mondial des Solutions fondées sur la nature de l'UICN répond à ce besoin. Composé de huit critères et d’une série d’indicateurs associés, il est conçu comme une approche souple et apprenante, nourrie par la pratique et les expérimentations. La gouvernance du standard mondial des SfN de l'UICN sera chargée de réviser les critères tous les quatre ans, avec pour but d'améliorer et d'encourager l'engagement de toutes les parties prenantes dans l'approche SfN.

Si cette norme reconnaît des modèles déjà existants – par exemple les approches déjà mises en œuvre par l’AFD comme la gestion intégrée de bassins-versants ou la restauration de corridors écologiques –, elle a aussi le mérite d’exclure des solutions trop ponctuelles, considérées comme solutions vertes par certains secteurs mais qui, sur le plan de leur co-bénéfice biodiversité, ne sont pas à la hauteur des défis à relever. 

En ce sens, cette norme permet l’adoption d’une méthode d’évaluation des investissements pour les investisseurs, bailleurs ou collectivités. Elle offre également à tous un cadre opérationnel pour penser et concevoir des projets ou programmes intégrant la biodiversité et le climat : les développeurs des SfN pourront utiliser le standard mondial, son guide d'utilisation et son outil d'autoévaluation pour concevoir de manière cohérente des projets de SfN efficaces, ambitieux en termes d'échelle et de durabilité, garantissant un langage commun pour les intervenants et facilitant des partenariats innovants.

L’AFD, principal bailleur de la définition de la norme

L’AFD a été le principal bailleur de la définition de la norme, dans le cadre de l’accord-cadre France-UICN initié en 2005. Grâce à son soutien, la norme a pu bénéficier d’une consultation mondiale qui lui a donné une profondeur technique et qui a permis son ajustement aux besoins des acteurs publics et privés de différents secteurs. Surtout, cette consultation large et internationale confère au cadre actuel de la norme une légitimité forte. Celle-ci fonde la confiance des utilisateurs et analystes potentiels – comme l’AFD – qui constitue un capital clef pour le déploiement de tout outil normatif.

Au-delà de son soutien financier lors de l’élaboration technique de la norme, l’AFD s’engagera désormais sur le terrain pour promouvoir la mise en œuvre des principes de cette norme au sein des projets qu’elle finance. En effet, le groupe s’est engagé à doubler et porter à 1 milliard d’euros sa finance biodiversité à horizon 2025.

Un tel engagement suppose d’intégrer les SfN dans les portefeuilles d’investissements de tous les secteurs d’intervention du groupe, en particulier ceux qui sont les plus impactants sur la nature : le secteur agricole via la transition agroécologique, mais aussi l’aménagement urbain via une attention spécifique aux enjeux de la qualité de l’eau, des pollutions ou d’artificialisation des sols. 

Augmenter les investissements biodiversité supposera également une réorientation des investissements attribués au secteur financier des pays partenaires de l’AFD, pour lequel la norme SfN peut devenir un référentiel partagé.

Initier de nouveaux espaces de dialogue

Au fond, et c’est sans doute sa valeur ajoutée majeure, la norme des Solutions fondées sur la nature a le potentiel pour initier de nouveaux espaces de dialogue qui permettent à l’ensemble des acteurs de développement de s’entendre très concrètement, pour chaque territoire, sur la manière dont les ressources et espaces naturels peuvent être mobilisés et valorisés au service de l’atteinte des ODD.

L’adoption de ce standard par la communauté des banques de développement, qui représente 10 % de l’investissement international, constituerait à cet égard un levier structurant pour la réorientation à grande échelle de ces fonds au service d’une relance durable de l’économie post-Covid. C’est dans cette perspective qu’au-delà de son seul engagement, l’AFD a placé l’intégration de la nature dans les stratégies d’investissement des banques de développement au cœur de l’agenda du premier sommet Finance en commun.

Ce sommet réunira plus de 450 banques de développement à l’échelle internationale les 11 et 12 novembre prochains à Paris, dans le cadre du Forum pour la paix.