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En matière de santé, la Nouvelle-Calédonie, par son caractère insulaire, son éloignement, son organisation spatiale et ses fortes disparités économiques et sociales, doit faire face à de nombreux défis : accès aux soins, prise en charge du grand âge et du handicap ou encore maîtrise des dépenses. L’Agence française de développement (AFD) accompagne le territoire, ses habitants et les acteurs du secteur.

Jusqu'à très récemment, la Nouvelle-Calédonie ne pouvait garantir à ses 28 000 habitants l'accès à toutes les spécialités médicales. Même si certains patients étaient évacués et pris en charge en Australie, la Nouvelle-Calédonie bénéficiant d’une bonne coopération médicale avec son proche voisin, certaines pathologies lourdes nécessitaient de se déplacer jusqu’en métropole.

« La croissance actuelle du nombre de maladies chroniques, liées en partie au vieillissement de la population, entraîne une augmentation durable des besoins, ce qui a conduit à une réflexion sur l’offre de soins à mettre en place pour y répondre », souligne Camille Perreand, chef de projet Santé et protection sociale à l'AFD. En outre, la vétusté et l’exiguïté des anciens équipements, adossées à un éclatement des structures sur de nombreux sites, étaient préjudiciables à la sécurité des prises en charge, notamment en maternité-néonatalogie.

De fortes inégalités territoriales

Ces faiblesses se doublaient, à l’échelle locale, d’inégalités territoriales dans l’accès aux soins. Sur l’île, des disparités subsistaient entre le sud du territoire, où se situe la capitale Nouméa, qui concentre l’activité économique, la plupart des centres administratifs et la grande majorité des médecins ; et le Nord, enclavé, ainsi que les îles, éloignées.

La province Nord pouvait certes compter sur deux hôpitaux, l’un situé dans la commune de Poindimié et l’autre à Koumac, à l’extrême nord du territoire, mais difficiles d’accès et offrant une gamme de soins sensiblement inférieure à celle de Nouméa. Ainsi, la plupart des habitants leur préféraient les établissements de santé de la capitale, malgré la distance à parcourir.

Cette situation faisait peser une inégalité dans la qualité de la prise en charge des Calédoniens. Pour répondre à ces enjeux, il a été décidé de transformer le paysage hospitalier par la mise en œuvre de plusieurs projets structurants que l’AFD a accompagnés.

  •   Un nouvel hôpital de référence à la périphérie de Nouméa

Un premier objectif a été atteint avec la création d’un nouvel hôpital de référence pour le territoire, mis en service en décembre 2016. Situé à la périphérie de Nouméa et doté d’une capacité d’accueil renforcée (562 lits – 645 à terme – pour améliorer le taux d’équipement de l’île, inférieur à celui de la métropole), l'établissement dispose également de nouvelles spécialités médicales (comme l’unité de gériatrie aiguë) et peut accueillir des équipes de métropole pour opérer les patients sur place. « Ce nouveau plateau technique permet le regroupement d’activités auparavant dispersées et améliore la qualité des soins », note Camille Perreand. D’autant que la logistique est désormais mutualisée avec le centre hospitalier spécialisé en santé mentale et gériatrie.

  • Une opération emblématique : l’hôpital de Koné, au Nord

Pour rééquilibrer l’offre de soins entre le Nord et le Sud, les autorités ont également souhaité doter la commune de Koné, chef-lieu et ville carrefour de la province Nord, d’un hôpital offrant les activités obstétricales et médico-chirurgicales de base ; l’objectif étant que les habitants puissent bénéficier sur place de soins appropriés pour certaines pathologies, sans avoir à se déplacer jusqu’à Nouméa. L’AFD a contribué au co-financement de cette nouvelle structure d’une capacité de 63 lits et places mise en service fin 2018.

Tandis que les activités de médecine, chirurgie, obstétrique des sites hospitaliers de Koumac et Poindimié ont été regroupées sur l’hôpital de Koné, ces deux autres structures de soins existantes ont été reconverties en sites hospitaliers d’aval, prenant en charge les soins de suite et de réadaptation ainsi que quelques activités ne nécessitant pas de plateau technique avancé.

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Maquette du Pôle sanitaire du Nord, à Koné.
 

Les hôpitaux de Koné et Nouméa participent également d’un projet médical intégré, notamment dans le champ de l’obstétrique : « Dans cette spécialité, les équipes sont tournantes, ce qui permet la mutualisation des savoirs et garantit une qualité de soins équivalente sur l’ensemble du territoire », explique Camille Perreand.

  • Repenser l’offre privée

En Nouvelle-Calédonie, comme en métropole, l’offre de soins privée concerne une large partie de la population. C’est elle qui prend en charge une part importante des opérations chirurgicales. Elle dispose également de spécialités qui n’existent pas à l'hôpital, notamment l’urologie. C’est pourquoi l’AFD a également accompagné la fusion des trois cliniques privées déjà existantes en une seule structure dotée de 210 lits, reconstruite à proximité immédiate du centre de Nouméa, qui contribue à proposer un pôle hospitalier polyvalent regroupant sur son site des infrastructures modernes et adaptées aux besoins.

Quels enjeux pour l’avenir ?

  • La structuration du secteur médico-social

Si cette recomposition a permis une vraie modernisation des soins ainsi qu’un rééquilibrage de l’offre en Nouvelle-Calédonie, de nombreux défis demeurent, notamment dans les secteurs du handicap et de la dépendance : « Pour le moment, la prise en charge du grand âge doit encore être améliorée, confirme  Camille Perreand. À moyen terme, il y a un vrai enjeu de mise en place de nouveaux équipements et de services, ainsi que d’une offre de soins intégrée pour les personnes âgées. Sinon, ce manque d’offre de soins va, comme en métropole, rétroagir sur les hôpitaux avec le risque que les patients âgés engorgent les urgences et les services. »

L’AFD a déjà participé à ce mouvement au travers du financement de la construction d’un EHPAD à Nouméa, en partenariat avec la SEM Agglo et la Mutuelle du Bien Vieillir. Elle a également contribué à une étude qui vise à diagnostiquer le parcours de soins de la personne âgée en Nouvelle-Calédonie, assortie à des recommandations pour améliorer la prise en charge des personnes de plus de 60 ans sur le territoire.

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Projet d'EHPAD à Nouméa en partenariat avec la SEM Agglo et la Mutuelle du Bien Vieillir © SEM Agglo

 

Quant au secteur du handicap, il est, à l’heure actuelle, uniquement pris en charge par le secteur associatif, historiquement constitué autour des familles des personnes porteuses de handicap. Même si la Nouvelle-Calédonie a mis en œuvre depuis plusieurs années une démarche de structuration et de professionnalisation du secteur, l’offre de structures est encore insuffisante.

L’AFD participe là aussi à son amélioration, comme le détaille Camille Perreand : « L’AFD accompagne financièrement la construction d’une maison d’accueil spécialisée au nord de Nouméa pour accueillir les personnes souffrant de déficience mentale forte. Nous sommes également en train d’instruire un financement au bénéfice de l’Association calédonienne des handicapés pour accompagner la modernisation d’une structure d’accueil de jour pour les enfants porteurs d’un handicap lourd. »

  • La soutenabilité des dépenses de santé

Autre défi à relever : la soutenabilité des dépenses de santé. Comme le souligne Ambre Eono, en charge du secteur de la santé à l’AFD en Nouvelle-Calédonie, « la consommation médicale totale est en progression de plus de 20 % sur les cinq dernières années. Les investissements importants dans le secteur hospitalier, conjugués au développement de l’offre de soins dans le secteur médico-social, s’ils sont nécessaires, restent les principaux déterminants d’une augmentation structurelle des dépenses de santé. »

Malgré la succession des plans de maîtrise des dépenses de santé depuis les années 2000, leur trajectoire semble difficilement soutenable à ce rythme. C’est pourquoi l’AFD a décidé d’accompagner les pouvoirs publics locaux dans l’application du plan de santé Do Kamo, qui vise à réviser son modèle économique, construire une nouvelle gouvernance du système et améliorer son efficience via la promotion d’une offre de prévention renforcée et coordonnée avec l’offre de soins.