L’un des récents accords conclus entre le Kenya et la France inclut un prêt à des conditions préférentielles de 30 millions d’euros. Que couvrira-t-il ?
Ghislain de Valon : Ce qui était essentiel, ce n’était pas seulement le soutien en soi, mais aussi la rapidité à laquelle le prêt serait disponible. L’aide de l’AFD au gouvernement kényan est délivrée via un outil spécifique existant. Face à la crise du Covid-19 et aux besoins sanitaires, hygiéniques et budgétaires urgents qui en résultent, l’accord de soutien existant a été modifié afin d’accélérer le processus habituel et d’éviter les procédures d’approbation habituelles, trop lentes. Cette modification permet également d’ajouter 30 millions d’euros à l’aide à la gestion des finances publiques existante et d’allouer des fonds à la santé.
Le ministère kényan de la Santé a identifié les limites de son budget et les programmes à financer de manière prioritaire, ainsi que les besoins généraux liés à la santé. Cela comprend de l’oxygène liquide pour traiter des patients partout dans le pays, une assistance technique, la fourniture de kits de tests manuels et des campagnes de prévention.
Sur le plan de l’eau et de l’assainissement, quelles ont été les actions de l’AFD ?
G.V. : Avant l’implication de l’AFD à Kisumu, la troisième plus grande ville du pays, près de la moitié de la population n’avait pas un accès adéquat à l’eau courante et seuls 8 % des habitants pouvaient compter sur un approvisionnement stable en eau. Il était également difficile d’accéder à de l’eau pure à un prix juste. Une situation qui ne pouvait durer dans cette grande ville dont la population s’accroît, et avec elle toute une série de problèmes sanitaires liés à l’approvisionnement en eau.
L’AFD s’est donc concentrée sur l’accès à l’eau dans des villes comme Kisumu, Mombasa et Nairobi. À Kisumu, nos travaux sur l’eau et les sanitaires ont commencé dès 2000. Le secteur a souffert d’investissements inadéquats, d’un manque d’entretien et d’une infrastructure bancale. Ce qui existait n’était certainement pas en état de combler la demande d’une population urbaine en pleine croissance. Tout le réseau de distribution devait être revu.
Suite à nos actions dans le secteur de l’eau au Kenya au fil des ans, nous en sommes venus à comprendre qu’un approvisionnement en eau durable dépend également de la gestion de « l’eau non rémunérée ». Il s’agit de l'eau produite pour laquelle – en raison de fuites, de vol ou d’inexactitudes de comptage – la société ne recueille pas de revenus.
La série d'accords de financement signés dans le cadre du Lake Victoria Water and Sanitation Project (LVWATSAN) et impliquant la BEI et l’Union européenne en sus de l’AFD, a pour but de faire passer l’accès à l’eau de 62 % à 80 % ; l’accès aux sanitaires de 55 % à 80 % ; la part de l’eau non rémunérée d’environ 43 % à moins de 28 %.
Les routes kényanes sont également une priorité. Pourquoi ?
G.V. : Le réseau routier du Kenya s’est développé progressivement au fil du temps, mais de nombreuses routes ne sont pas entretenues et sont en très mauvais état.
Le gouvernement s’est rendu compte qu’il était urgent de trouver des financements et a donc mis sur pied une collecte de fonds pour l’entretien des routes, via la vente de carburant. Cette initiative n’a cependant pas suffi et des partenaires financiers, comme l’AFD, sont intervenus.
Le nouveau projet de routes rurales financé par l’AFD a permis de restaurer près de 2 000 km de chaussées, tout en créant de l’emploi. Car ce réseau routier a été créé avant tout grâce à de la main-d’œuvre locale, avec un minimum de mécanisation.
Ce projet, qui bénéficie d’une subvention de l’Union européenne en plus du prêt de l’AFD, touche six comtés marginalisés du centre et du nord du pays. Il permettra un meilleur accès aux marchés, aux écoles, aux centres de santé et aux services gouvernementaux, tout en améliorant la mobilité des biens et des personnes dans et hors de la région.
Ce projet est réalisé avec le soutien de l’Union européenne