Najib Chajiddine est arbitre international de basketball 3x3. Cette discipline, moins connue que le basketball conventionnel, a bénéficié d’un important coup de projecteur lors des Jeux Olympiques de Paris 2024. Le Franco-Marocain de 34 ans en a été un arbitre. Il fut même le plus jeune à officier durant les matchs.
Malgré un métier très prenant qui lui demande de parcourir le monde au gré des rencontres et des compétitions, cet ancien banquier explique qu’il a toujours été important pour lui de s’investir « pour les autres, de laisser une trace, un héritage ». C’est de ce besoin qu’est née l’association United Maroc qu’il a fondée pour rendre le sport – et en particulier le basketball 3x3 – plus accessible à des jeunes défavorisés. « L’idée est de proposer des entraînements, des tournois ou encore des formations à l’arbitrage à des jeunes qui n’auraient pas eu les moyens d’y accéder », explique-t-il.
Du groupe WhatsApp à l’association
Son projet a été soutenu en 2022 par l’Agence française de développement (AFD) et Paris 2024 dans le cadre de l’incubateur Impact 2024 international. Ce programme soutient et accompagne des sportives et des sportifs dans leurs projets d’entrepreneuriat visant à réduire les inégalités économiques et sociales grâce au sport. Najib Chajiddine et son projet United Maroc font partie de la deuxième promotion de l’incubateur.
« Au début je n’avais qu’un groupe WhatsApp entre amis et on faisait des actions ponctuelles. Avec l’incubateur Impact 2024 international, nous avons pu exister formellement. J’ai créé l’association, déposé la marque, lancé un site web et des réseaux sociaux. United Maroc n’était plus seulement une idée, c’est devenu une vraie association ! », s’enthousiasme-t-il aujourd’hui.
Des rencontres dans les quartiers défavorisés
Tout a commencé il y a trois ans à Zenata, au Maroc, là où Najib Chajiddine est né. « L’idée était d’aller dans des quartiers où l’accès au sport est difficile et de proposer des activités sportives gratuites ou pas trop chères », confie-t-il. Pendant ses vacances, le jeune père de famille commence par organiser des petites rencontres de basket dans les quartiers défavorisés de la banlieue de Casablanca. Puis l’idée d’allier les volets social et sportif est venue.
L’objectif était de permettre à de jeunes Marocains issus de milieux modestes de pratiquer le basketball sans passer par des académies très onéreuses. « Celles-ci coûtent très cher, il faut compter entre 4 000 et 5 000 dirhams [environ 400 euros] par an pour un entraînement par semaine. Très peu de familles peuvent débourser autant pour une activité sportive. Je voulais faire en sorte que celui qui bénéficie de l’activité ne soit pas celui qui la paye. »
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Pendant les huit mois qu’il passe au sein de l’incubateur Impact 2024 international, on lui apprend à lancer un projet et à faire en sorte qu’il prenne forme. Des experts sont présents pour le guider et répondre à ses questions. « On a mis entre mes mains des outils précieux, des clés, pour faire de mon idée un projet concret », se souvient-il.
United Africa
À la sortie de l’incubateur, United Maroc devient la première académie de basketball 3x3 d’Afrique. Deux ans plus tard, l’association compte déjà plus de 4 000 bénéficiaires dans le royaume. Trois séances de basket 3x3 sont prévues chaque semaine. « Ces jeunes sont entraînés par des jeunes bénévoles que nous avons nous-mêmes formés au sein de l’académie. L’idée est de faire en sorte qu’ils soient un jour employés et payés par l’association. L’objectif est que nous puissions leur offrir des débouchés professionnels et ainsi créer de l’emploi pérenne dans le domaine sportif. »
En plus de l’accompagnement personnalisé et du bagage pratique apporté par l’incubateur, Najib Chajiddine a pu rencontrer d’autres athlètes qui s’inscrivent dans la même dynamique d’engagement social que lui. « On a échangé les bonnes pratiques mais aussi nos réseaux. C’est comme ça qu’on est arrivé au projet d’étendre l’association au Gabon, au Sénégal et au Mali. C’est grâce à la boxeuse malienne Marine Camara qu’on va pouvoir le faire. Nous avons tous les deux fait partie de la même promotion au sein de l’incubateur », détaille le jeune arbitre.
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Depuis juin 2024, United Maroc est devenue United Africa. Mais l’évolution de l’association ne devrait pas se limiter à une expansion sur le volet géographique uniquement. Najib Chajiddine envisage désormais de faire de ses académies de basket 3x3 des académies multisports. « Dès septembre 2024 nous allons proposer des cours de boxe par exemple. Mais ce n’est qu’un début, nous voulons ajouter encore d’autres disciplines. »
Du football au basket à Quimper
Si Najib Chajiddine croit autant en son projet, c’est parce qu’il estime que c’est grâce au sport et au basket-ball qu’il a lui-même réussi à construire une vie qu’il aime. « J’adore mon quotidien, c’est vrai que c’est fatigant et que ce n’est pas tous les jours facile de concilier vie professionnelle et vie de famille, mais qu’est-ce que je suis heureux de me réveiller tous les matins ! »
Le premier sport de Najib Chajiddine n’était pourtant pas le basket. Il a commencé par le football. « Je suis né au Maroc mais à partir de mes 5 ans j’ai habité à Quimper, en France. Le mauvais temps rendait les terrains de football impraticables alors il a fallu trouver une alternative. Le basketball était le parfait moyen de continuer à s’entraîner sans être arrêté par la météo. À partir de mes 8 ans, j’ai pu passer presque tous mes week-ends dans la salle à mettre des paniers, raconte-t-il, un sourire en coin. Comme je ne pouvais pas enchaîner les matchs indéfiniment, il a fallu trouver le moyen de s’impliquer différemment. J’ai donc commencé à arbitrer et j’ai découvert que j’aimais bien prendre des décisions ! »
Son caractère volontaire, calme, et son autorité naturelle lui ont permis de devenir arbitre officiel à 14 ans et d’être repéré seulement un an plus tard par la ligue de Bretagne de sport-étude. « J’étais à peine majeur quand je suis devenu arbitre dans les championnats de France de basket. Et à 34 ans on m’a appelé pour les Jeux Olympiques de Paris. C’est incroyable là où le sport peut vous mener. »
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