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Au robinet d'eau d'une école à Kampong Cham, Cambodge
Ce vendredi 27 août marque la fin de la Semaine mondiale de l’eau, une conférence mondiale pour trouver des solutions en vue d’élargir l’accès aux services d’approvisionnement en eau et d’assainissement, tout en améliorant la qualité de l'eau. Organisé par le Stockholm International Water Institute (SIWI), l’évènement, avec son thème « Construire la résilience », fait le point sur la liste d’obstacles empêchant plus de 2 milliards de personnes d’accéder à l’eau potable.

Universitaires, scientifiques, experts en politiques, acteurs de la société civile… près de 16 000 personnes participent – de manière virtuelle – à la Semaine mondiale de l’eau. Face aux crises climatiques telles que les inondations, les tempêtes ou encore les sécheresses, la question des solutions naturelles pour affronter ces problèmes se fait de plus en plus pressante. Pour Gilles Kleitz, directeur du département Transition écologique et gestion des ressources naturelles de l’Agence française de développement (AFD), « la planète a tiré la sonnette d’alarme. Il en va de notre responsabilité, en tant que praticiens de l’eau et de la nature, de trouver des solutions pour changer fondamentalement les choses. »

Un certain nombre de pays en voie de développement peinent à atteindre l’Objectif de développement durable 6 : garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement. Bien qu’1,8 milliard de personnes aient obtenu un accès à des services basiques d’accès à l’eau potable depuis 2000, près de 2,2 milliards de personnes dans le monde ne disposent pas de services sûrs et accessibles d’alimentation en eau potable selon un rapport publié en 2019 par l’Unicef et l’Organisation mondiale de la santé.

L’enjeu de la finance mixte

Le manque de financement, exacerbé par la crise climatique mondiale et la pandémie, représente un obstacle majeur à l’amélioration de la situation. Clément Frenoux, responsable de projet Eau et assainissement au sein de l’AFD, plaide en faveur d’une approche plus novatrice de la finance afin de favoriser l’accès aux services d’approvisionnement en eau et d’assainissement « La finance mixte peut créer de nouveaux marchés et de nouvelles opportunités. » 

La finance mixte (blended finance) est un mélange de différentes formes de capitaux, mobilisés pour des projets de développement, généralement dans des pays en voie de développement. Elle peut combler le déficit de financement lorsque des fonds viennent à manquer, notamment dans les secteurs liés à l’eau. Cela s’avère très utile dans des pays comme le Maroc ou le Cambodge, où des taux d’intérêt trop élevés ont empêché les petites entreprises d’intensifier leurs activités entrepreneuriales en matière d’accès à l’eau potable.

Des prêts abordables 

En 2014, les équipes de l’AFD ont travaillé main dans la main avec l’Union européenne (UE) pour améliorer l’accès à l’eau et à l’électricité au Cambodge. « Lorsque nous avons évalué le projet, l’accès à l’eau et à l’électricité était très faible dans les zones rurales : à peine 30 à 60 % selon les zones pour l’eau », explique ainsi Anne Chapalain, ancienne responsable du bureau de l’AFD au Cambodge. 

En plus des subventions de l’UE pour l’assistance technique, l’AFD a accordé un crédit de plus de 15 millions de dollars américains à la Foreign Trade Bank of Cambodia (FTB). À son tour, la FTB a pu accorder des prêts plus abordables à des fournisseurs de petite et moyenne taille. « Le prêt accordé par la FTB m’a permis de créer une installation de traitement puisant l’eau de la rivière pour la transformer en eau potable et d’étendre le réseau de canalisations à d’autres villages, explique Sio Leanseang, propriétaire d’une petite société de distribution d’eau. Le taux d’intérêt est bas et je sais que je peux le rembourser. »

Un poids financier inégalable

En 2019, au Cambodge, 47 petits fournisseurs d’eau et d’électricité dans 18 provinces ont obtenu un financement, ce qui leur a permis d’aider la population. Près de 40 000 foyers ont désormais accès à de meilleurs services d’approvisionnement en eau. « Avant, j’allais chercher de l’eau au puits mais c’était loin de la maison et j’avais du mal à la rapporter, confie Hoeun Morn, sexagénaire. Maintenant, il y a un robinet près de chez moi qui est très facile d’accès. Je suis heureuse d’avoir accès à de l’eau potable car cela m’aide à rester en bonne santé. »

 

Des approches novatrices apparaissent, comme la finance mixte. Peu d’institutions sont mieux placées que les banques publiques de développement pour la mettre en œuvre, le total de leurs financements représentant environ 10 % des investissements mondiaux.

Des ressources inexploitées 

Une nouvelle étude commandée par l’AFD indique toutefois que les banques publiques de développement sont sous-exploitées dans le secteur de l’eau. Bien qu’elles opèrent en Europe, elles pourraient intervenir pour canaliser l’aide financière à grande échelle dans les pays en voie de développement, notamment pour la construction, l’entretien et la réhabilitation des infrastructures. 

Les banques publiques de développement sont en mesure de proposer une variété de services de financement à de meilleures conditions que les banques commerciales, notamment aux services publics et aux collectivités locales. Elles peuvent également fournir des services de préparation de projets et de soutien technique. « Les institutions financières publiques ont prouvé qu’elles pouvaient agir comme un catalyseur pour le financement des investissements dans le secteur de l’eau et de l’assainissement, rappelle Gilles Kleitz. C’est pourquoi nous avons décidé de créer une Water Finance Coalition pour explorer ce potentiel. » 

Cette jeune coalition veut contribuer à inverser la tendance et à faciliter l’accès à l’eau potable. Avec plus de 2 milliards de personnes susceptibles d'en bénéficier dans le monde, les enjeux ne pourraient guère être plus importants.