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Commerce Sénégal
Quelles sont les difficultés à surmonter et les solutions possibles pour favoriser l’insertion professionnelle des étudiants sur le continent africain ? Réponses avec les Prs Souad Djelassi et Mbaye Fall Diallo, coordinateurs du projet Discom, qui vise à former les acteurs de la distribution et de la commercialisation des produits locaux au Sénégal.

Le projet Discom est lauréat de la deuxième édition du programme Partenariats académiques Afrique-France. Il est porté par l’Université Iba Der Thiam de Thiès au Sénégal et l’Université de Lille.

Selon vous, quels sont les principaux défis à relever pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes en formation ?

Souad DjelassiSouad Djelassi : Deux défis majeurs se posent dans le contexte africain. D’une part, les difficultés d’accès à une formation professionnalisante de qualité limitent fortement les possibilités d’insertion professionnelle en Afrique. Mobiliser l’enseignement à distance pour les nombreux jeunes qui habitent dans des zones sans offre de formation est nécessaire. D’autre part, les partenariats avec le monde socio-économique sont rares et c’est pourtant la clé de l’insertion professionnelle. Il est donc primordial de favoriser ces partenariats en Afrique en faisant dialoguer étroitement les établissements de formation et les entreprises.

Mbaye Fall DialloMbaye Fall Diallo : Les faibles taux d’insertion professionnelle sont liés principalement à l’absence de dispositifs structurants, réglementaires et cofinancés (ou à leur faiblesse), pour favoriser l’emploi des jeunes pendant ou dès la sortie de formation. Les stages sont rares et l’apprentissage quasi inexistant. Or, ce sont deux opportunités d’insertion des jeunes diplômés. Les États doivent donc veiller à mettre en place des incitations pour développer ces dispositifs en Afrique.


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Quels sont les dispositifs qui peuvent ou pourraient favoriser leur insertion professionnelle, notamment au Sénégal ?

Mbaye Fall Diallo : Je pense d’abord qu’il faut mettre en place une stratégie nationale de l’apprentissage et renforcer les financements des organismes en charge, comme le Fonds de financement de la formation professionnelle et technique (3FPT) au Sénégal. Sans accompagnement financier, les entreprises auront du mal à recruter des apprentis qu’il faut former et qui ne sont pas présents la moitié du temps en entreprise. Ensuite, il faudrait réformer le système des stages pour inciter les PME et TPE formelles ou informelles, qui représentent environ 80 % des entreprises au Sénégal, à prendre des stagiaires, notamment pendant les vacances scolaires.

Souad Djelassi : Il est important selon moi de travailler sur le corps professoral, qui doit être formé à la logique de l’insertion professionnelle. L’intervention des professionnels doit être encouragée fortement. Il convient également de changer les méthodes pédagogiques, en faisant par exemple découvrir aux étudiants les différents métiers que vise leur formation par des visites terrain, des conférences animées par des professionnels… L’entrepreneuriat étudiant doit aussi être intégré dans tous les programmes de formation. Il faut faire en sorte que l’étudiant diplômé soit capable de créer son entreprise à la sortie de sa formation, voire pendant sa formation.


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Pourriez-vous nous parler plus particulièrement du dispositif d’alternance que vous avez mis en place dans le cadre du projet Discom ?

Souad Djelassi : Dès la phase de candidature, nous avons contacté plusieurs entreprises partenaires (chambres de commerce, Esteval, Auchan, Centre international du commerce extérieur du Sénégal…) pour communiquer sur l'intérêt de l’alternance pour l’étudiant (insertion professionnelle), l’entreprise (formation de futurs salariés) et l’établissement de formation. Auchan, déjà partenaire de l’Université de Lille, a été sensible à ce dispositif qui est bien établi en France. Nous avions également sollicité le 3FPT, équivalent des opérateurs de compétences en France, comme partenaire du projet Discom pour anticiper le financement. Une fois le projet Discom obtenu, nous avons signé une convention tripartite, avec engagement ferme d’Auchan à embaucher les alternants à la sortie, pour concrétiser le projet d’une licence 3 professionnelle en alternance.

Mbaye Fall Diallo : Au niveau législatif, l’apprentissage existe au Sénégal dans le secondaire, en BTS notamment, nous donc avons pu nous appuyer sur ce cadre de base. L’expertise de l’Université de Lille a également contribué à mettre en place l’alternance au Sénégal. Nous avons reproduit le modèle incluant un contrat salarié pour l’étudiant et un double suivi par le maître d’apprentissage et le tuteur universitaire. Les médias locaux et nationaux ont également été largement mis à contribution pour donner de la visibilité au projet Discom et à l’entreprise partenaire, Auchan, qui innove ainsi en matière de politique de recrutement du personnel.