Avec l’apparition du coronavirus et des mesures nécessaires pour endiguer la pandémie, la situation des travailleuses et travailleurs du secteur informel togolais est devenue préoccupante. Le programme Novissi associe innovation technologique et appui financier pour les soutenir.
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Mars 2020. Le Togo connaît ses premiers cas de contamination au coronavirus. Rapidement, le pays déploie des mesures pour endiguer la crise sanitaire : couvre-feu, bouclage de villes, restriction dans les transports, réaménagement des horaires de marché… Dans les zones concernées, l’activité économique tourne au ralenti, particulièrement dans le secteur informel qui regroupe la grande majorité des emplois. À Lomé, la capitale, ou dans la préfecture de Tchaoudjo, au centre du pays, difficile pour les portefaix, vendeuses ambulantes, conducteurs de taxis-motos et minibus, coiffeuses, couturières, artisans ou employés de bar de gagner leur pain quotidien.
Pour éviter une paupérisation de ces travailleurs, le programme Novissi – soutenu par l’Agence française de développement (AFD) – met à leur disposition un revenu de compensation.
À travers Novissi (« solidarité » en éwé), l’État togolais offre un appui financier bimensuel par transfert monétaire en « mobile money » à ces populations rendues davantage vulnérables. Nul besoin de compte en banque : un smartphone basique suffit pour assurer le versement des fonds.
Depuis la mise en application des mesures restrictives jusqu’à leur allègement, plus de 580 000 travailleuses et travailleurs du secteur informel ont bénéficié d’un revenu de remplacement à hauteur de 5 250 FCFA (8 euros) mensuels pour les hommes et de 6 125 FCFA (9 euros) pour les femmes.
« Novissi représente une véritable rupture méthodologique avec le passé. Cela préfigure la manière dont les programmes de filets sociaux par transfert monétaire seront dorénavant mis en œuvre dans notre pays. » Cina Lawson, ministre togolaise des Postes, de l’Économie numérique et des Innovations technologiques.


Dispositif innovant reposant sur une plateforme digitale et biométrique, le programme Novissi est conçu de façon agile et s'est distingué par la rapidité de sa mise en place, à peine huit jours après le démarrage de l’état d’urgence sanitaire.
Dans son déploiement, la plateforme a bénéficié de l’apport des deux opérateurs de téléphonie mobile du marché via l’exploitation de leurs dispositifs de transfert d’argent. Un engagement et une vraie rupture des systèmes de travail pour ces opérateurs qui placent ici les bénéficiaires au centre du dispositif.
Le système innove également dans son mécanisme d’adressage mais aussi de distribution de l’aide par téléphone mobile, tout en renforçant l’inclusion financière. Il assume le rôle de programme de filet social pour préserver les gains et freiner les risques de pauvreté extrême en cette période de Covid-19, en ciblant le secteur informel avec un dispositif digital de transferts monétaires à grande échelle. Fin août 2020, Novissi comptait 1 394 194 personnes enregistrées et 581 117 bénéficiaires, dont 376 100 femmes (65 %) et 205 017 hommes (35 %).
Partenaire de ce programme sans équivalent au moment de son lancement, l’AFD en proposera une étude d’évaluation pour nourrir la réflexion sur l’instauration de systèmes de protection sociale innovants au Togo et dans d’autres pays d’Afrique.
La facilité d’inscription et le court délai de réception des revenus de remplacement ont rendu le programme Novissi accessible à tous, et surtout à toutes : les femmes constituent quasiment les deux tiers des bénéficiaires. Aussi, le trio de tête des métiers des inscrits est composé de revendeuses à 40 %, de couturières à 16 % et de ménagères à 12 % : des professions à forte proportion féminine.
Le marqueur genre est également mis en exergue dans les montants des aides. Depuis avril, les femmes ont perçu 12 250 FCFA par mois, un peu plus que les hommes (10 500 FCFA). « L’objectif en mettant en place un montant différencié est d’alléger la charge souvent importante laissée aux femmes pour s’occuper des personnes dépendantes du foyer, que sont les enfants, mais aussi les personnes âgées », explique Cina Lawson, la ministre togolaise des Postes, de l’Économie numérique et des Innovations technologiques.
