KmerPad, c’est d’abord une jolie success story à la camerounaise : celle d’une poignée d’entrepreneurs bien décidés à mener de front une véritable « révolution menstruelle » et lever le tabou des règles en Afrique. Pour lutter contre le fléau de la stigmatisation sociale des menstruations et freiner la déscolarisation précoce des jeunes filles, ils décident, en 2012, de fonder un groupement d’initiative commune (GIC) qui produit et commercialise des serviettes hygiéniques en coton, lavables et réutilisables, made in Cameroun.
Huit ans plus tard, l’entreprise, soutenue par l’AFD et sa partenaire, la société coopérative d’investissement Fadev, emploie 20 salariés à Yaoundé et commercialise ses kits de serviettes hygiéniques réutilisables dans tous les supermarchés camerounais. Un joli succès qui a valu à l’équipe de KmerPad de recevoir, en novembre 2019, le prix Solidarité internationale des Grands Prix de la finance solidaire.
Face à la pandémie, une reconversion éclair
En pleine crise du coronavirus, cet engagement et ce sens de l’initiative font à nouveau des merveilles. Dès la fin du mois de mars, alors que l’épidémie n’en était qu’à ses prémices au Cameroun, les fondateurs de KmerPad ont pris la décision de réorienter une partie de leur production vers la fabrication de masques de protection en tissu réutilisables, une denrée rare à Yaoundé comme partout dans le monde.

Les locaux de l’entreprise ont été réaménagés en un temps record de manière à pouvoir garantir un maximum de sécurité pour les 20 salariées (séparation d’un mètre entre les bureaux, mise à disposition de solutions lavantes), qui ont également été formées aux principaux gestes barrière.
Disposant déjà de coton à foison et du tutoriel de l’Afnor comme indicateur méthodologique, les équipes de KmerPad ont démarré la fabrication des masques. Ne restait plus qu’une dernière étape à valider : obtenir une confirmation de conformité de la part des autorités locales. C’est chose faite depuis avril. En seulement quelques semaines, l'entreprise est parvenue à produire plus de 8 000 masques.
Des masques déclinés dans toutes les tailles
Outre le fait d’être réutilisables, les masques de KmerPad ont également la particularité d’être déclinés en trois tailles : femme, enfant et homme. « C’est une vraie plus-value, note Alice Cases, responsable de levée de fonds chez Fadev. Aujourd’hui, la très grande majorité des masques dans le monde n’est disponible qu’en une seule taille : la taille homme. Cela implique une moins bonne protection pour les femmes et les enfants, chez qui le masque peut s’avérer trop grand et donc moins protecteur. KmerPad, en créant des masques en trois tailles permet ainsi de protéger efficacement tout le monde, et s’illustre une fois de plus dans son combat pour l’égalité. »
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Face à l’afflux de commandes en provenance d’ONG, de ministères ou de particuliers, l’équipe espère pouvoir produire bientôt 50 000 masques ; elle a d’ores et déjà lancé une demande de subventions pour pouvoir financer les salaires et coûts fixes nécessaires à l’augmentation de son activité.
Le Fadev, un accompagnement financier… mais pas que
De son côté, le Fadev bénéficie d’une subvention de fonctionnement de l’Agence française de développement courant jusqu’en 2022. Un moyen efficace, pour l’AFD, de valoriser les initiatives d’entrepreneurs et d'entrepreneures locaux en faveur de la réduction des inégalités basées sur le genre et l’autonomisation des femmes. D’autant que l’action de la société va bien au-delà d’un simple soutien financier : dans son projet de réorientation, KmerPad a pu bénéficier d’un accompagnement quotidien.