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Eléphants Kenya
Alors que la COP15 sur la biodiversité fait suite à la COP27 sur le climat, la convergence entre ces deux luttes est devenue indispensable. Si le lien entre climat et biodiversité peut sembler évident au premier abord, il est en réalité multifacette. Comment la préservation de la biodiversité peut-elle servir la cause climatique, et comment relever le double défi climat-biodiversité ?

La lutte contre le dérèglement climatique et celle contre l’effondrement de la biodiversité sont intimement liées. Depuis le rapport « Biodiversité et changement climatique » rédigé en 2021 par 50 scientifiques du Groupe d’experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (Giec) et de la Plateforme intergouvernementale scientifique et politique sur la biodiversité et les services écosystémiques (IPBES), cette prise de conscience prend de l’ampleur. La protection et la restauration des écosystèmes sont nécessaires pour relever le défi climatique et, réciproquement, limiter la hausse des températures moyennes est indispensable pour préserver la biosphère. « Les causes de ces deux phénomènes sont les mêmes et sont liées à nos modes de production et de consommation. Il faut donc répondre en même temps aux deux menaces », explique Sandra Lavorel, directrice de recherche CNRS au Laboratoire d’écologie alpine, à Grenoble, et membre de l’IPBES.


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La nature, l’une des premières victimes du changement climatique

Le changement climatique accentue l’extinction ou la migration vers les pôles des espèces, exacerbe les risques liés à l’eau (stress hydrique, sécheresses, inondations…) et entraîne la dégradation des milieux naturels qui ont atteint leurs limites d’adaptabilité : certaines barrières de corail, zones humides, forêts tropicales, certains glaciers… Inversement, la dégradation des écosystèmes menace de libérer dans l’atmosphère de grandes quantités de gaz à effet de serre, et donc, d’aggraver le changement climatique. 

Cette dégradation des écosystèmes constitue aussi une menace pour les sociétés humaines. Selon Gilles Kleitz, directeur exécutif des Solutions de développement durable à l’AFD, « les 40 ou 50 % des 8 milliards d’humains les plus fragiles sont directement dépendants des écosystèmes au quotidien. Lorsqu'ils flanchent, les personnes se nourrissent moins bien, développent davantage de maladies, leurs habitations sont inondées… La biodiversité est un sujet de développement phare. »


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Attention aux solutions climat qui nuisent à la biodiversité

Certaines solutions ont été créées pour atténuer le changement climatique, mais s’avèrent préjudiciables à la biodiversité et au bien-être des populations, comme le rappelle le rapport commun Giec-IPBES. Par exemple, les barrages hydroélectriques peuvent entraîner la détérioration de la qualité de l’eau en raison des changements dans la charge en sédiments, les éoliennes peuvent interférer avec les oiseaux migrateurs, les monocultures d’arbres, en particulier lorsqu’elles remplacent des écosystèmes non forestiers, peuvent être dommageables si l’espèce plantée devient envahissante…

La nature, actrice de l’équilibre du climat

La réduction des émissions de CO2, l’un des objectifs majeurs de l’Accord de Paris, notamment en modifiant les systèmes de production, est indispensable mais n’est pas suffisante. Une autre priorité est la protection et la restauration de la nature, avec un objectif de conservation d’au moins 30 % des écosystèmes terrestres et marins d’ici 2030, discuté pendant la COP15. 

Plus les surfaces protégées et restaurées seront importantes, plus le climat et l’Homme en bénéficieront, notamment parce que la nature joue un rôle majeur dans le stockage du carbone. Selon les résultats du Global Carbon Budget 2022, environ la moitié des gaz à effet de serre émis par les activités humaines est absorbée par les écosystèmes terrestres et océaniques, qui jouent un rôle essentiel de « puits de carbone »


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L’AFD promeut les solutions fondées sur la nature dans les pays partenaires. Plusieurs projets illustrent cette dynamique, comme celui de « ville éponge » de Mianyang en Chine : la restauration d’un corridor écologique tend à lutter naturellement, via l’absorption, le drainage et le stockage propres à la terre, contre le risque d’inondation exacerbé par le réchauffement climatique. Au Sénégal, 208 000 hectares de mangroves bénéficieront de programmes de conservation et de restauration de la biodiversité. Au Kenya (voir la vidéo ci-dessous), deux projets financés par l'AFD et mis en œuvre par le Green Belt Movement visent à restaurer les forêts en collaboration avec les communautés locales.

 

 

S’engager et s’aligner sur les accords climat et biodiversité pour relever le double défi

Les scientifiques considèrent qu’au moins 30 % des solutions face aux effets du changement climatique reposent sur la nature. Lors du One Ocean Summit de janvier 2021, l’AFD s’est donc engagée à ce que 30 % de ses financements climat soient directement favorables à la biodiversité d’ici 2025 – objectif atteint dès 2021 – et à doubler ses financements biodiversité, pour parvenir à 1 milliard d’euros d’ici 2025.

L’AFD souhaite également s’aligner sur le nouveau Cadre mondial pour la biodiversité, à l’instar de son alignement avec l’Accord de Paris, devenant ainsi l’une des premières banques de développement à traiter conjointement le climat et la nature.

La COP27 a consacré une partie importante des discussions à la préservation des forêts et des océans et aux solutions fondées sur la nature. Pour Mathilde Bord-Laurans, responsable de la division Climat et nature de l’AFD, « non seulement nous considérons que la biodiversité ne doit pas être un aspect moins important de l’agenda, car les fondements de la crise sont tout aussi cruciaux, mais aussi que les canaux qui permettent de financer la lutte contre ces crises sont les mêmes : les banques publiques, l’alignement des flux financiers sur l’Accord de Paris et sur le futur Cadre mondial pour la biodiversité. »