Pharmacienne de formation, née et élevée en Belgique dans les années 1970, Hlima Razkaoui a choisi de mettre son expertise au service de ses convictions en rejoignant Pharmaciens sans frontières en 1999. Après cinq ans sur le terrain sur différents continents, puis cinq ans au siège de l’ONG en France, elle est recrutée par Handicap International pour s’engager sur des projets complexes, tels que la lutte contre les mines antipersonnel et l’accès aux services pour les réfugiés à la frontière entre la Birmanie et la Thaïlande.
Autant d’expériences qui ont jeté les bases de son engagement actuel avec Care Maroc. « J’ai toujours nourri le désir de travailler au Maroc, mon autre pays d’origine », confie-t-elle. Après quinze ans au sein d’ONG internationales, elle réalise enfin ce souhait.
« Ce qui m’a séduit chez Care, c’est son approche holistique du développement et de la lutte contre la pauvreté », confie Hlima Razkaoui. L’ONG place le développement communautaire inclusif au cœur de sa mission, en impliquant les femmes et les populations locales afin de surmonter les défis liés aux inégalités de genre, au changement climatique ou encore à la pauvreté. Et assume un rôle de facilitateur dans l’écosystème local. « Nous testons et adaptons les bonnes pratiques internationales aux spécificités du Maroc », insiste-t-elle.
Les femmes actrices du changement
Le projet Femmes pour l’environnement, mené par Care Maroc avec le soutien de l’AFD, en est un exemple. Depuis son lancement en 2020, il a transformé la vie de 1 500 femmes dans la région de Marrakech-Safi grâce à l’entrepreneuriat durable et à des pratiques écologiques. « Ces femmes sont passées de travaux domestiques non rémunérés à des activités économiques viables », détaille la directrice de Care Maroc.
Les bénéficiaires ont notamment reçu un accompagnement pour développer leur propre activité économique mais aussi en matière d’alphabétisation et de négociation, ainsi qu’un ensemble d’outils pour favoriser les pratiques écologiques, telles que l’utilisation de panneaux photovoltaïques ou de colorants naturels dans la filière du tapis.
Leur place au sein de la communauté évolue également : elles deviennent des interlocutrices centrales à l’échelle locale. « Pendant la crise du Covid-19, les sécheresses ou le séisme d’Al Haouz, ces femmes nous ont aussi aidés à identifier les foyers les plus vulnérables et ont joué un rôle central dans l’aide humanitaire », souligne-t-elle.
« Une fois qu’elles réussissent, ces femmes leaders disent : "Ce que j’ai appris, je veux maintenant le transférer, le déployer pour d’autres villages." Elles répliquent l’approche d’elles-mêmes et c’est extraordinaire. Certaines, qui n’avaient parfois jamais quitté leur village, se retrouvent quelques années plus tard à Rabat, plaidant lors de tables rondes face à des ministres. C’est incroyable de voir ce qu’elles accomplissent lorsqu’elles prennent conscience de leur potentiel », se réjouit Hlima Razkaoui. La deuxième phase du projet a démarré en décembre 2024.
Un avenir après le séisme au Maroc
Dans un autre registre, l’attention portée aux jeunes, notamment les jeunes filles, par le biais du programme Avenir meilleur pour l’entrepreneuriat et l’apprentissage (Ameal), démontre l’étendue de l’impact communautaire de Care Maroc. Ce projet, d’une durée de deux ans et porté par IECD Maroc et Care Maroc, est financé par l’AFD. Il soutient la relance économique et éducative dans dix douars et villages de la province d’Al Haouz, fortement touchée par le séisme de septembre 2023, par le rétablissement de dix unités dédiées à l'éducation préscolaire des enfants de 3 à 6 ans, tout en proposant des activités artistiques et sportives pour surmonter les traumatismes.
Pour l'année scolaire en cours, 297 enfants bénéficient déjà d’unités réhabilitées ou équipées de structures modulaires. Une réponse cruciale pour « éviter une année blanche et permettre aux enfants d’accéder à l’éducation », estime Hlima Razkaoui. Encadrées par des éducatrices formées au soutien psychosocial, ces structures apportent une aide à la reconstruction émotionnelle des enfants.
Ces différentes initiatives s’inscrivent dans une vision plus large portée par Care Maroc : garantir des résultats durables au-delà des projets spécifiques. « La pérennité, c’est quand les changements continuent sans nous », résume Hlima Razkaoui. En 2025, l’ONG souhaite explorer des solutions financières alternatives pour compléter les financements institutionnels, en impliquant notamment des entreprises privées. Depuis 2017, l’AFD soutient cette dynamique en renforçant les acteurs locaux.