• logo linkedin
  • logo email
europe AFD election Union
Les citoyens de l’Union européenne éliront du 6 au 9 juin leurs représentants au Parlement européen. Quel sera l’impact de ces élections sur la politique d’aide au développement de l’Europe ? Quel rôle joue-t-elle aujourd’hui ? Éléments de réponse avec Anna Lipchitz, responsable du groupe AFD auprès de l’Union européenne.
Quels sont les enjeux des élections européennes pour la politique européenne de développement ?

Anna Lipchitz AFD union europenneAnna Lipchitz : Il ne devrait pas y avoir de ruptures majeures, mais plutôt une affirmation des tendances palpables depuis quelque temps. Les deux grands groupes politiques PPE et S&D se maintiendront probablement au sein du Parlement européen, avec un recul des Verts et de Renew et une montée en puissance de l’extrême droite. S’ensuivra le renouvellement de la Commission européenne avec une nouvelle présidence et de nouveaux commissaires. Le curseur politique devrait se positionner davantage sur un agenda de repli nationaliste, de protection des intérêts, avec un essor du secteur privé européen et de son implication dans la politique de développement.

Les sujets liés aux matériaux critiques, à l’énergie et à l’immigration resteront parmi les priorités. La réorientation géographique se poursuivra avec un approfondissement de la stratégie du voisinage Est, pour une réponse européenne à la guerre en Ukraine et un accompagnement des pays candidats à l’adhésion à l’Union européenne. Les approches en Équipe Europe seront consolidées et le lien avec le secteur privé européen renforcé. L’influence géopolitique de la Commission européenne continuera d’être affirmée avec la valorisation de l’offre européenne sur la scène internationale, cherchant à être plus visible sur le terrain, pour plus d’impacts.

Que représentent les délégations de fonds de l’UE vers le groupe AFD ?

A. L. : Le groupe AFD reste l’un des partenaires qui utilisent le plus de fonds européens : près de 835 millions d’euros en 2023, après un pic à 1,2 milliard en 2022. Trois types d’instruments financiers ont été mobilisés l’année passée : les garanties de prêts (100 millions d’euros), les subventions (140 millions) et le mixage, qui consiste à coupler des subventions européennes à nos prêts. Les 225 millions d’euros qui nous ont été confiés par la Commission européenne l’an dernier pour le mixage ont ainsi généré 2,2 milliards d’euros de prêts AFD. Depuis 2014, ce sont 2 milliards d’euros de subventions européennes qui ont permis à notre groupe d’intervenir à hauteur de 12 milliards d’euros en prêt dans 160 projets. La mobilisation des fonds européens pour notre plan d’affaires est donc primordiale.


Tout comprendre à la relation entre le groupe AFD et l'Union européenne en une infographie


La prévision de délégation de fonds de 840 millions d’euros en 2024 dépendra de plusieurs facteurs, dont notre capacité à répondre aux demandes de la Commission européenne sur les sujets liés aux matériaux critiques, à l’Ukraine et au lien avec le secteur privé. La signature et le déploiement des garanties resteront des défis pour 2024.

Notre relation partenariale avec l’écosystème européen – Commission européenne, bilatéraux européens, BEI et BERD – nous permet d’entretenir une vision consolidée des enjeux de développement. Cette relation s’orchestre autour de trois réseaux : celui des banques publiques bilatérales [Jefic, rassemblant l’AFD et ses homologues allemand KfW, italien CDP, espagnol Aecid et polonais BGK, qui sera présidé à partir de juin 2024 par l’AFD], celui des praticiens [PN, présidé actuellement par Expertise France] et EDFI [rassemblant Proparco et ses homologues européens]. Le groupe AFD, seule institution européenne à disposer d’une telle offre globale intégrée, irrigue ainsi ces différents réseaux.

Quels projets de développement ces fonds permettent-ils de soutenir ?

A. L. : Je vais citer trois exemples de projets, particulièrement structurants et inspirants ! Au Vietnam, dans le cadre du Partenariat pour une transition énergétique juste (Jet-P), le programme Team Europe Energy Transition Facility soutient le pays dans la mise en œuvre de sa stratégie de sortie du charbon et de neutralité carbone. Une assistance technique subventionnée à hauteur de 16 millions d’euros par l’Union européenne et de deux millions d’euros par l’AFD est combinée à des prêts d’un montant prévisionnel d’un milliard d’euros de l’AFD, la KfW et la BEI pour investir dans la transition énergétique : production d’énergies renouvelables, systèmes de stockage, réseau de distribution et de transmission de l’électricité. Nous aimerions répliquer cette approche avec l’Union européenne dans d’autres pays.


Lire aussi : L’AFD aux côtés du Vietnam pour un avenir bas-carbone et résilient


En Tanzanie, le gouvernement tanzanien, le groupe AFD, l’Union européenne et la Banque africaine de développement travaillent ensemble à la construction d'un barrage et d'une centrale hydroélectrique dans la région de Kagera qui permettra d’alimenter entre trois et quatre millions de personnes en électricité, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre. Le pays dispose d'un potentiel considérable d'énergies renouvelables qu’il compte exploiter pour faire face à la croissance rapide de la population.

Enfin, dans le cadre du premier cofinancement Jefic entre la KfW et l’AFD, les deux institutions financent au Pérou un prêt de 150 millions d’euros au Fondo MiVivienda en faveur de logements durables et abordables. Ce projet permettra de donner accès à un logement formel digne et durable à plus de 1 500 foyers péruviens, soit environ 6 500 personnes. Il comporte un objectif spécifique visant à favoriser l'accès au logement des femmes et à ouvrir l’accès au crédit immobilier à des ménages habitant en dehors de la capitale Lima.


Lire aussi : notre sondage sur la perception par les Européens de l'investissement solidaire en 2024