Quels sont les enjeux du Forum urbain mondial de Katowice ?
Audrey Guiral-Naepels : Ce rassemblement organisé par ONU Habitat réunit tous les deux ans les spécialistes des questions urbaines et du développement des villes. Cette édition a lieu en Pologne et sera sans doute tournée vers l’Europe et les enjeux de crises, compte tenu du contexte très proche de la guerre en Ukraine.
La France, notamment par la voix de l’Agence française de développement (AFD), y portera les messages du Nouvel Agenda urbain : le soutien au développement de villes plus inclusives, productives et résilientes au changement climatique, visant l’atteinte de l’Objectif de développement durable n°11 des Nations unies.
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De quelle manière le groupe AFD intervient-il en matière de logement dans les pays en développement ?
A. G.-N. : L’AFD intervient depuis soixante-dix ans dans ce domaine. Un milliard d’euros a été alloué ces dix dernières années dans les pays étrangers pour soutenir des programmes de logements durables, deux milliards en incluant les Outre-mer. C’est un sujet sur lequel nous avons une forte valeur ajoutée, tant en termes d’expérience que d’outils financiers pour accompagner les différents acteurs.
Le secteur du logement représente un immense enjeu économique. Dans le même temps, il compte parmi ceux qui doivent le plus réduire leurs émissions de gaz à effet de serre. C’est un levier important en termes de développement social. Pourtant, le secteur est aujourd’hui délaissé par les bailleurs de fonds, alors même que la pandémie de Covid-19 l’a remis sur le devant de la scène : suivre des injonctions comme « Restez chez vous », « Distancez-vous » ou « Faites attention à votre hygiène » suppose en effet de disposer d’un logement de taille suffisante et doté d’un accès à l’eau.
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À l’échelle du groupe AFD, nous travaillons à intégrer la question du logement comme un élément à part entière du développement urbain, qui prenne en compte la diversité des besoins et la nécessité d’une transition bas-carbone des villes tout en étant financièrement soutenable. Concrètement, cela passe par un soutien financier à la production de bâtiments énergétiquement efficaces et abordables financièrement pour les ménages à faibles revenus, ainsi que la rénovation thermique. Nous disposons pour cela d’outils comme le Programme d’efficacité énergétique dans les bâtiments (PEEB), qui nous permet de financer des études de faisabilité, ou comme la Sustainable Housing Initiative (SHI), une facilité multi-pays dotée de 3,2 millions d’euros pour financer une assistance technique auprès des entités publiques locales ou nationales en charge des questions de logement.
Comment lever les obstacles à l’investissement des villes ?
A. G.-N. : Les villes du Sud font face à une croissance urbaine sans précédent : cinq millions de nouveaux citadins s’y installent chaque mois. Ce qui a pris un siècle en Europe se fait en vingt ou trente ans en Afrique. C’est même plus rapide que ce qu’a connu la Chine. Cela entraîne la création de quartiers précaires, la concentration de nombreux habitants en recherche d’opportunités économiques, un étalement urbain… Les besoins d’investissements sont très importants pour absorber ces nouveaux urbains et produire les équipements de base dont ils ont besoin. Mais les villes ne disposent bien souvent que de très peu de compétences institutionnelles et de dotations de l’État pour développer leur territoire.
Nous répondons à ce problème de plusieurs manières. D’abord par un soutien aux processus de décentralisation à l’échelle nationale, afin que l’ensemble des villes d’une certaine taille voient leurs dotations budgétaires augmenter, voire bénéficient de nouvelles compétences. Nous finançons également directement les projets menés au niveau des villes. Cela peut paraître anecdotique mais elles sont nombreuses à ne pas avoir la main sur les projets qui s’y déroulent, parce que ceux-ci sont conduits par les ministères sectoriels. Nous appuyons aussi les institutions financières qui financent les villes, notamment en Afrique du Sud et en Amérique du Sud.
Pour accompagner cette dynamique, nous avons lancé avec l’Union européenne et la coopération suisse le fonds Cities and Climate in Sub-Saharan Africa (Ciclia) pour la préparation de projets à co-bénéfices climat. Doté de 12 millions d’euros, il nous a permis de soutenir 38 villes et de financer et co-financer par la suite près de 800 millions d’euros de projets. Nous lancerons d’ailleurs une phase 2 de Ciclia en 2023 à destination d’une quarantaine de villes. Nous voulons des villes plus durables et actrices de leur territoire.
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