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Sport Maurice
À moins d’un an des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris 2024 et à l’occasion du Sport Impact Summit de Dakar, Jean-Baptiste Gobelet, ancien joueur international du rugby français et cofondateur de la RM Mauritius Academy of Sport, revient sur le programme de renforcement des académies sportives et inclusives en Afrique et sur les interactions entre sport et développement.

Article publié pour la première fois le 26 juillet 2023 et mis à jour le 6 novembre 2023


Suite aux engagements du président Emmanuel Macron lors du Nouveau sommet Afrique-France en octobre 2021, un programme a été lancé par l’AFD en partenariat avec Play International - Groupe SOS et l’Institut Diambars pour appuyer des académies sportives africaines. D’ici 2025, 30 académies recevront un financement pour développer leur expertise, en particulier en matière d’éducation et de promotion de l’égalité femmes-hommes. Parmi elles : la Mauritius Academy of Sport (AOS), première académie multisport olympique en Afrique.

Quelle est la genèse de la RM Mauritius Academy of Sport ?

Jean-Baptiste GobeletJean-Baptiste Gobelet : Le projet de l’AOS est né à Maurice d’une ambition : faire du sport de haut niveau et du sport grand public un maillon essentiel dans le développement d’un territoire, en l’associant à une solution éducative complète et inclusive. 

La quête d’identité est le sujet numéro un chez les jeunes de 12 à 18 ans. Le prisme du sport leur permet de se créer une identité, de s’émanciper et de construire leur parcours professionnel et sportif. Concernant le sport de haut niveau (appelé « élite » dans notre académie), nous parlons de discipline : le sport forge une culture de choix, essentielle à cet âge critique. Enfin, il n’y a pas de haut niveau sans développement, et pas de développement sans haut niveau : ce sont deux vases communicants. 

C’est comme cela qu’est né le projet de l’académie : vouloir impacter les jeunes et leurs cercles sociaux, via un parcours d’excellence sportive et académique centré sur l’athlète, sur un territoire mauricien comprenant aujourd’hui moins de 1 000 licenciés sportifs.

À travers le Programme de renforcement des académies, nous avons ainsi lancé la première promotion en septembre 2021, composée de 27 athlètes pour sept disciplines olympiques.


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Comment ce projet peut-il impacter durablement un territoire et ses populations ?

Dès le départ, nous avons souhaité être entièrement inclusifs : dans la sélection des athlètes comme dans les sports proposés.

L’AOS est la première académie multisport olympique en Afrique : l’intégration de tous les sports olympiques et paralympiques démultiplie les opportunités pour ces jeunes, qui vont pouvoir bénéficier d’un accompagnement complet, qu’ils fassent du rugby, du football, du basket, du surf, du judo ou du skateboard.

L’inclusivité s’inscrit aussi et surtout dans la manière de recruter les élèves, qui se fait sur un principe méritocratique. Nous avons un système de bourses afin d’inclure les jeunes défavorisés au même titre que les autres. Une attention est portée également au recrutement de filles, dans un objectif de parité.

Mais le sport n’est pas un vecteur social systématique : notre mission est de former des sportifs de haut niveau qui impacteront directement et durablement leur territoire d’origine, leurs proches, leur communauté, en leur inculquant des valeurs et en leur assurant une carrière professionnelle et/ou un emploi décent (coach, formateur, encadrant…). Ce que nous souhaitons valoriser, c’est le coefficient d’impact : si chaque éducateur, parent, élève ou athlète impacte son entourage à son niveau, l’effet positif sera démultiplié. À Bel Ombre par exemple, nous sommes passés de 1 à 120 joueurs de rugby : ces enfants s’entraînent désormais tous les jours, sont passionnés et en pleine santé.


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Comment la première académie multisport olympique d’Afrique peut-elle contribuer aux Objectifs de développement durable (ODD) sur le territoire mauricien et ailleurs ?

L’Academy of Sport contribue en effet à la mise en œuvre des ODD : la santé et le bien-être, une éducation de qualité et l’accès à des emplois décents, l’égalité femmes-hommes, la réduction des inégalités, l’innovation et les infrastructures. Cela crée même un autre ODD potentiel avec l’accès au « sport élite ».

Tout d’abord, les élèves bénéficient de l’environnement d’un sportif de haut niveau et d’un suivi santé complet. Grâce à un accompagnement scolaire complet et adapté, ils vont pouvoir obtenir en fin de parcours académique un examen reconnu à l’international, ainsi qu’une garantie d’emploi décent via des partenariats d’entreprises.

L’Academy promeut et renforce également le sport féminin : la part des filles dans les promotions augmente de 15 % chaque année. À terme, notre objectif est la pleine égalité des sexes au sein de la structure, mais tout est une question de culture et cela nécessite de sensibiliser l’ensemble du microcosme mauricien. L’Academy est aussi ouverte au handisport : nous souhaitons faire évoluer de jeunes talents, la plupart du temps exclus du système, en athlètes en tant que tels, en leur apportant l’accompagnement et le soutien nécessaire. Tout change par exemple pour un jeune qui participe aux Jeux Paralympiques.


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Enfin, à partir de cette année, nous programmons de construire de nouvelles infrastructures sportives dans les zones défavorisées, notamment à Rodrigues et Bel Ombre, afin de toucher au plus près les populations.

En septembre 2023, nous avons lancé notre troisième promotion, qui comprend 100 athlètes (dont des Réunionnais et des Malgaches) pour 20 sports différents, avec 15 % d’élèves bénéficiant de bourses. À long terme, nous souhaitons déployer ce modèle en Afrique et au Moyen-Orient.

Les JO de Paris en 2024, ceux de 2028 aux États-Unis ou ceux d’Australie en 2032 sont tout autant d’opportunités pour notre académie de développer cette diplomatie sportive, d’envoyer de jeunes athlètes au sommet, et de renforcer leur impact sur leur territoire.